J’étais réveillée depuis quelques heures déjà, posée dans le salon, une tasse de café fumante posée devant moi. J’avais passé la nuit chez Kyllian, étant passée chez lui après ma soirée sur scène au piano bar dans lequel je travaillais. J’avais fini tard, et Lucas était donc couché quand j’étais arrivée. Levé de bonne heure, bien avant moi, il m’avait littéralement sauté dessus pour venir me réveiller le matin en apprenant que j’étais là, avant de sortir faire quelques courses avec Kyllian. Ce gamin était absolument adorable. Ce n’était pas mon fils, et jamais je ne me permettrais de m’imposer comme tel dans sa vie, mais il m’aimait bien, et je l’adorais aussi. Il m’avait d’ailleurs une fois demandé si c’était moi sa maman, le jour de son anniversaire. Je ne lui avais pas menti, je ne me le serais pas permis. Surtout que cela aurait voulu dire que je l’avais eu à 15 ans, et donc était tombée enceinte à 14 ans. J’avais certes fait pas mal de conneries dans ma vie, je n’avais jamais été stupide à ce moint. Cependant, j’aimais beaucoup ce petit bout’chou, et le voir à l’hôpital il y a quelques temps m’avait brisé le cœur. Il allait beaucoup mieux, et de ce fait, Kyllian lui aussi allait mieux. Autrement dit, tout allait bien en ce moment.

J’étais heureuse avec Kyllian, et même si je n’avais pas encore réussi à lui dire « je t’aime », les sentiments étaient là. Le seul garçon à qui je l’ai jamais dit était décédé dans un accident de voiture, et depuis cela, j’avais du mal à le dire. Encore plus de mal qu’en règle générale en tout cas.

Sur les coups de 10h30, j’entendis frapper à la porte. Kyllian ne m’avait pas dit qu’il attendait de la visite. Peut être était-ce le facteur, qui ne parvenait pas à faire entrer un coli dans sa boite aux lettres, ou un démarcheur, qui se ferait gentiment envoyer promener. Quoi qu’il en soit, je me levai. J’avais eu le temps de m’habiller rapidement depuis que Kyllian était parti avec Lucas, vêtue tout simplement d’un jean et d’un t shirt simple, trainant pieds nus car je n’avais pas besoin de porter mes talons hauts pour trainer sur le canapé. Ouvrant la prote je me retrouvais face à une jeune femme, grande, blonde et plutôt jolie. Pourquoi me semblait-elle familière ? Je n’eu pas à me poser la question trop longtemps, j’eu rapidement la réponse. « Bonjour ! Pourrais-je voir Kyllian s'il vous plaît ? C'est Emma, la mère de son enfant » Wow… je ne m’y attendais pas à celle là. Je savais qui était Emma. Elle n’avait même pas besoin de préciser qu’elle était la mère de Lucas pour que je le sache. Mais elle avait semblé tenir à le préciser, ayant particulièrement insisté sur cette partie de la phrase. « Je vois… » répondis-je tout d’abord. Je me demandai si Kyllian voulait la voir ou non. Devais-je la faire entrer, ou au contraire lui demander de repasser plus tard afin de ne pas me retrouver prise dans toute cette histoire si jamais Kyllian ne voulait pas la voir ? Je savais qu’il lui en voulait beaucoup, mais en même temps, Lucas se posait des tas de questions sur sa mère.. Ayant moi-même été abandonnée, je savais ce que c’était de se poser toutes ces questions. Même si la voir ici ne me plaisait personnellement pas, je ne pouvais pas choisir pour Kyllian, et je fini donc par ajouter. « Kyllian est parti faire quelques courses… Vous n’avez qu’à rentrer… »

Quelle fille apprécierait de voir l’ex grand amour, premier grand amour d’ailleurs, de son petit ami débarquer sans prévenir, totalement sortie de nulle part alors qu’elle avait totalement disparu de la circulation ? Moi, personnellement, je n’appréciait pas. Kyllian et moi n’étions pas ensemble depuis longtemps, rien de comparable avec les presque 2 ans que lui et Emma avaient passé ensemble. Les deux mois depuis lesquels Kyllian et moi étions ensemble étaient loin de faire le poids. Mais j’ignorais ses intentions, si elle venait pour revoir son fils simplement, ou bien si elle comptait reconquérir Kyllian. Si elle optait pour la seconde option, une chose était sure : je n’allais pas me laisser faire. Mais pour le moment, il n’était pas question de ça.

J’avais laissé Emma entrer, lui indiquant que Kyllian était parti faire des courses. Elle me sourit alors qu’elle rentrait dans l’appartement de Kyllian et que je fermais la porte derrière elle. Des jouets appartenant à Lucas trainaient par terre dans un coin où il avait l’habitude de jouer mais pour le reste, c’était relativement bien rangé. Mieux que dans mon mini appartement où j’avais du mal à trouver une place pour toutes mes affaires d’ailleurs, mais le propos n’est pas là. « Tutoie-moi, ça me gêne un peu que tu me vouvoie. Kyllian a du te parler de moi... De la mauvaise mère que j'étais… » Je ne me permettrais pas de juger. Elle avait peut être eu ses raisons - autres que de la lâcheté et de l’égoïsme - pour avoir fait ce qu’elle avait fait, des raisons que Kyllian lui-même ignorait. Cependant, j‘avais peu de respect pour les femmes qui abandonnent leur enfant. Lucas avait eu la chance d’avoir un super papa en la personne de Kyllian.

Ca n’avait pas été mon cas. Même sans avoir été confrontée à cette situation, et en étant plus du genre à vouloir tester tout comme je l’entend avec le minimum de responsabilités, je savais que si je me retrouvais dans la même situation qu’Emma, jamais je n’abandonnerai mon enfant. Je ne savais que trop ce que ça faisait. Je ne commentais pas cependant sur cette première réflexion d’Emma, qui était plongée dans la contemplation d’une photo de Lucas, Kyllian et moi, prise peu après la sortie de l’hôpital de Lucas. Emma semblait quelque peu stressé, ce que je pouvais comprendre. « J'ai étais idiote, idiote d'abandonner mon fils et mon petit copain. Surtout à ce moment, où nous avions besoin de l'un et de l'autre pour survivre à cette épreuve. C'est moi qui ai tout capoté. Moi qui ai joué à ma petite gamine prétentieuse et idiote et qui ai décidé de tout lâcher. Je le regrette, et si tu veux m'insulter tu peux, je te comprendrais amplement. Tu as le droit de me juger, je me juge moi-même ! » Vrai, vrai, et vrai. Pensai-je. Cependant, je n’en dis rien. Personnellement, je ne pouvais me plaindre du fait qu’elle ait laissé tomber Kyllian. Elle l’avait perdu, et maintenant c’est moi qui l’avait. Bien fait pour elle ! Emma pleurait à présent, mais je n’allais pas aller la prendre dans mes bras pour la réconforter. Nous n’étions pas amies, et cette erreur, elle l’avait faite toute seule, personne ne l’avait forcée à partir. Il était un peu tard pour pleurer maintenant. Lucas avait à présent 4 ans, et de l’eau avait coulé sous les ponts depuis qu’elle était partie. « Je ne vais pas t’insulter. » Dis-je calmement. Elle n‘avait clairement pas besoin de moi pour ça, elle le faisait très bien elle-même. « Mais ça ne veut pas dire que je respecte ta décision… Ou toi, pour être honnête. Mais j‘espère pour toi que tu ne t‘attends pas à ce que Kyllian t‘accueille avec les bras grands ouverts, parce que je ne pense pas que ça va arriver. Ton fils avait besoin d‘une maman, et tu n‘étais pas là. » Ajoutai-je. Je ne l’agressais pas, mais mon ton n’était pas non plus chaleureux. Au moins, elle saurait à quoi s’attendre avec Kyllian. Avec moi, je pense qu’elle l’avait su à l’instant où j’avais ouvert la porte. J’étais la petite amie de Kyllian. Son retour ne m’enchanterait donc pas, quoi qu’il arrive. Avec tout ça, je ne réalisait même pas que je ne m'étais pas présentée à elle.

« Je ne vais pas t’insulter. » dit-elle d'un ton calme...

Forte heureusement tout de même ! Il ne manquerait plus que ça, que la nouvelle copine de mon ex vienne m'insulter alors qu'elle ne me connait pas. Elle poursuivait :

« Mais ça ne veut pas dire que je respecte ta décision… Ou toi, pour être honnête. Mais j‘espère pour toi que tu ne t‘attends pas à ce que Kyllian t‘accueille avec les bras grands ouverts, parce que je ne pense pas que ça va arriver. Ton fils avait besoin d‘une maman, et tu n‘étais pas là. »

Je savais très bien que Kyllian ne m'accueillerait pas les bras ouverts. Après ce que je lui avais fait, je savais très bien que ce serait le contraire. Je suis peut être blonde, mais il ne fallait pas abuser. Je respectais la jeune femme qui se posait en face de moi, pourquoi ? Car, depuis quatre ans, elle éduque mon enfant, elle m'avait remplacé quand moi je n'étais pas là et même-ci c'est la nouvelle copine de mon ex, je ne pourrais pas la haïr...

- Sache que, je te serais redevable pour mon fils...Enfin, ton fils aussi, car tu m'as en quelques sortes remplacés quand je n'ai pas était là. Tu as sut faire sa mère...Sache que même-ci tu ne m'aimes pas, compte sur moi pour quoi que se soit...

Ses paroles n'étaient pas fausses, non non. Elles étaient bien vrai, pourquoi donc ? Peut-être parce que, Lucas était toute ma vie, et que je ne pouvais en vouloir à la femme qui s'en occupait. Je me sentais coupable pour cet enfant, car je n'avais pas était là pour ses anniversaires, car je n'ai pas été là lorsqu'il a fait ses premiers pas...Lorsqu'il est entré en maternelle. Tant d'événement que j'ai raté. Je me sens tellement coupable, c'est insupportable. Et puis Kyllian, comment j'ai put lui faire ça alors qu'il ne m'avait aucunement fait ça. Il aurait put partir comme ça quand je lui ai annoncée que j'étais enceinte. Mais non, lui il est resté...

Jamais je ne pourrais comprendre qu’une femme abandonne son enfant. Parfois, les choses peuvent se passer mal entre un homme et une femme, et le divorce est inévitable, mais abandonner son propre fils… C’était pour moi inconcevable. Probablement était-ce dû au fait que ma mère m’ait moi-même abandonnée à ma naissance, au fait que j’avais grandi sans vrais parents jusqu’à l’âge de neuf ans, que j’avais été seule pendant ce qui représentait aujourd’hui la moitié de ma vie… mais même si j’étais tombée enceinte à 15 ans, je n’aurais pas pu abandonner mon enfant. Ca, j’en étais sure, même si je n’avais pas été confrontée à cette situation, et c’est pour cette raison que, bien que je ne me montre pas aussi mauvaise que j’aurais pu l’être avec Emma, je ne la respectais pas pour autant. Le respect ça se gagne, ça se mérite. Elle n’avait rien fait pour le mériter. Et puis, au fond je me sentais aussi menacée par son retour. Kyllian et moi n’étions pas ensemble depuis longtemps, et nos quelques mois de relation n’étaient rien comparé aux deux années que lui et Emma avaient passées ensemble. Cependant, je ne laisserais personne me prendre mon petit ami, ça c’était sur et certain.

« Sache que, je te serais redevable pour mon fils...Enfin, ton fils aussi, car tu m'as en quelques sortes remplacée quand je n'ai pas été là. Tu as su faire sa mère...Sache que même-si tu ne m'aimes pas, compte sur moi pour quoi que se soit… »

Houla houla, elle sautait vite aux conclusions. En effet, j’avais été là pour Kyllian et pour Lucas, mais de là à me considérer comme la mère de Lucas… Il était trop tôt pour en arriver là. Je n’avais jamais prétendu être sa mère, même quand, à son anniversaire il y a quelques mois, il m’avait demandé si j’étais sa maman. J’avais en effet été là pour Lucas ces derniers temps, et il en avait eu besoin étant donné qu’il avait passé beaucoup de temps à l’hôpital - mais jamais je n’avais prétendu être quelqu’un que je n’étais pas. Et je ne mentirai pas non plus à Emma, en disant que Kyllian et moi filions le parfait amour depuis des années, blah blah blah.

« Houlà, doucement. » L’interrompis-je. « Je n’ai jamais prétendu être sa mère. Je ne suis pas avec Kyllian depuis assez longtemps pour en être arrivée là. Ca fait seulement quelques mois que je suis à San Francisco. » Expliquai-je. « Je suis la première fille que Kyllian a fréquenté depuis toi, avant, c’était seulement lui et Lucas, donc si tu dois être redevable à quelqu’un pour avoir pris soin de ton fils, c’est lui, pas moi. J’ai surtout été là pour Lucas quand il a été à l’hôpital ces derniers moi. Tout le reste, c’est avec Kyllian que tu dois en parler, pas avec moi. » Ajoutai-je finalement.

Je me montrais bien bavarde pour quelqu’un qui discute avec une fille à qui elle n’a pas la moindre envie de parler. Mais après tout, Lucas était son fils, même si elle avait été une mère pitoyable, et elle avait le droit de savoir. J’espérais juste que Kyllian ne m’en voudrais pas de lui avoir dit tout ça. Elle finira bien par le savoir de toute façon. Réalisant finalement que je ne m’étais pas présentée, j’ajoutais enfin « Au fait. Je m’appelle Jezzy. » Je n’étais pas la fille la plus aimable qui soit, mais ma mère m’avait bien élevée. Même si elle ne m’avait eue qu’à mes 9 ans, et que nous n’étions pas biologiquement liées.