Vendredi soir, et pour une fois, je ne bossais pas. Loan, ma petite amie, était déjà prise pour la soirée, si bien que je n’avais absolument rien de prévu, ce qui est rare pour moi. J’avais prévu de retrouver Kiara ce soir, profitant de cette soirée de congé. Vu le lieu où l’on devait se retrouver, il était évident que ce n’était pas moi qui avait choisi : le Ruby Skye. Les boites de nuit, ce n’était pas mon genre, mais Kiara avait choisi, et donc je devais me rendre au Ruby Skye.

Je m’étais habillé assez convenablement, histoire de ne pas me faire refouler par les videurs à l’entrée, et était arrivé sur les coups d’une heure du matin. Ayant eu des problèmes de drogue par le passé, je tâchais d’éviter tout ce qui pouvait me faire replonger dans tout ça, y compris l’alcool, et j’avais donc demandé un cocktail sans alcool. C’était justement mes problèmes avec la drogue qui avaient provoqué ma rencontre avec Kiara. Elle était un peu plus jeune que moi, et nous nous étions rencontrés parce que nous avions le même dealer. Cependant, si j’étais moi-même sobre aujourd’hui - et ce grâce à une cure de désintox que Loan, qui était ma petite amie à ce moment là, m‘avait poussé à faire - ce n’était pas le cas de Kiara. Elle avait essayé, sans succès, et je tâchais d’être là pour elle, de la soutenir quand ça n’allais pas, et de l’aider du mieux que je pouvais. Cependant, je n’étais ni médecin ni thérapeute et bien que je sois passé par là, je n’étais pas vraiment le mieux placé pour la faire arrêter complètement. C’était difficile, et encore plus lorsqu’on devait le faire seul, sans l’aide de gens qui savent de quoi ils parlent, et quoi faire pour vous aider. J’avais essayé plusieurs fois, sans succès. J’aurais voulu savoir quoi faire pour pouvoir aider Kiara.

Je l’attendais patiemment dans la boite, posé au comptoir. Pour une fois que c’est moi qui me trouvait de ce côté du comptoir, et non derrière en train de servir les clients, ça me changeait un peu. Je préférais cependant les endroits plus calmes, avec de la musique différente. J’étais plus rock/pop-rock que electro et toutes ces musiques qui passaient en boite. Et je n’étais pas non plus vraiment un danseur, au plus grand regret de Loan. Enfin, je devais pouvoir supporter une soirée en boite, je suppose, n’est-ce pas ? Ce n’était pas non plus insurmontable. Enfin, si Kiara ne se dépêchait pas d’arriver, j’irais probablement l’attendre dehors plutôt que de rester planté là comme un idiot.

Kiara, tout comme moi, en avait un peu vu de toutes les couleurs. Elle plus que moi d’ailleurs, et je pouvait comprendre, ayant été moi-même dépendant à la drogue pendant plusieurs années, qu’arrêter était dur pour elle. Je me rappelais de cette sensations - l’oubli total de ses soucis, l’impression que plus rien n’a d’importance, se laisser glisser dans cette torpeur… - que l’on a quand on a prit une bonne dose d’une de ces substances illicites. Mais elles sont illégales pour une raison, et j’avais mis un moment à le comprendre, et a réaliser que ça me détruisait plus que ça ne m’aidait. J’aurais voulu pouvoir aider Kiara à se sortir de ça, mais j’ignorais comment. C’Est-ce à quoi j’étais en train de penser quand Kiara arriva enfin. Elle me fit la bise avant de s’asseoir à côté de moi au bar. Elle commanda un shot de vodka, le but cul sec, avant de finalement prendre la parole. « Alors, comment ça va toi ? » Me demanda-t-elle.

« Bah, moi ça va, et toi ? » Demandai-je. Ce n’était pas une question en l’air, posée par habitude comme tout le monde le fait. On se voit, on se salue, et on se demande comment ça va juste pour la forme, sans vraiment s’intéresser à la réponse. Je savais que Kiara traversait une sale période, et que cela durait depuis un moment. Alors je voulais savoir comment elle allait. C’est à ça que ça sert, un ami, non ? Je devais être un sacrément bon ami d’ailleurs, pour avoir trainé mes guêtres jusqu’en boite, moi qui n’aimait pas ça, et était un bien piètre danseur. Chanteur, musicien, oui, ça je m’en sortais bien. Danseur ? Une vraie catastrophe ambulante. Loan, ma petite amie avait bien essayé de me faire danser un peu, et Kiara aussi d’ailleurs, mais sans succès. Je me sentais parfaitement ridicule. Alors si j’avais accepté de voir Kiara en boite, c’était vraiment pour lui faire plaisir. « T’auras finalement réussi à me trainer en boite alors, hein ? » ajoutai-je avec un petit sourire avant de boire une gorgée de mon verre sans alcool. Bien que je me préoccupe de savoir si elle allait bien ou non, je ne voulais pas non plus plomber l’ambiance de la soirée. Si elle m’avait trainé ici, c’est probablement qu’elle avait envie de s’amuser un peu, et partir dans une leçon de morale sur la drogue, ou bien lui faire me raconter toutes ses misères dans le détail d’allait probablement pas l’aider non plus. Il faut savoir choisir le bon moment, n’est-ce pas ?